La pierre comme mémoire vive
Ma démarche s’enracine dans un geste ancestral : celui de tailler la pierre à même le paysage, dans une relation directe, presque archaïque, entre le corps, la matière et l’environnement.
Ce rapport intuitif à la pierre est à l’origine même de mon parcours artistique. Enfant, sur les plages de Normandie, je réalisais mes premières sculptures en creusant des blocs de craie tombés des falaises, au bord de la mer. C’était un jeu silencieux, un dialogue tactile avec une matière tendre, blanche, marquée par le temps. Ce souvenir a durablement façonné ma manière d’approcher la sculpture : non pas comme un projet formel, mais comme un geste spontané, instinctif, enraciné dans un lieu.
Aujourd’hui, je poursuis cette exploration à travers une pratique que j’appelle taille de pierre intuitive, inspirée des premiers sculpteurs de la préhistoire. À cette époque, la création n’était ni institutionnelle ni symbolique au sens contemporain : elle était rite, survie, trace et dialogue avec le monde. La pierre n’était pas un matériau passif, mais un interlocuteur vivant, porteur de mémoire.
J’interviens in situ sur des blocs naturels, des roches, parfois des falaises, dans des lieux souvent isolés, ouverts aux éléments. Aucun croquis préalable, aucune maquette : uniquement le geste, l’outil, la main et l’écoute. Chaque entaille est une réponse à la matière, à la lumière, à la forme déjà présente.
Ce n’est pas une œuvre transportable, mais une expérience vécue, un ancrage dans le réel et dans le temps géologique. C’est une manière de retrouver le lien entre création et paysage, entre l’humain et la pierre.
Cette approche peut également se transmettre sous forme d’ateliers collectifs en nature, ouverts à tous, pour redécouvrir le plaisir du geste simple et libre, en lien direct avec le sol et les éléments.